L’enfant du train – Ruth Druart

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Résumé de l’éditeur :
Au cœur de l’Occupation, à Paris, Sarah vient d’être arrêtée. Parce qu’elle est Juive. Juste avant de monter dans le train pour Auschwitz et les camps de la mort, la jeune femme prend une terrible décision : elle donne Samuel, son bébé, à un inconnu.
L’homme n’hésite pas une seconde et décide de tout faire pour sauver et prendre soin de cet enfant. Avec sa fiancée et le petit Samuel, ils fuient Paris pour les États-Unis, pays où l’on peut encore être libre et en sécurité. Ensemble, ils vont former une belle famille.
Au fil du temps, ils oublient les traumatismes de la guerre. Jusqu’à ce que, neuf ans plus tard, une femme frappe à leur porte. Une femme qui a survécu à l’enfer par amour pour son fils. Mais ce retour va déclencher une tempête dont personne ne pourra sortir indemne…

 ★ Merci à Eric Poupet Presse & Communication pour ce SP ★

☆ AVIS DE BELI ☆

Lorsque j’ai débuté la lecture de ce roman, je me suis demandée de quelles façons l’auteure allait nous présenter l’histoire. Il y aurait eu tant de façons possible de nous la conter, mais j’ai tout de suite beaucoup aimé la perspective de la découvrir comme elle l’a fait.

Le roman se compose de trois parties. Trois parties durant lesquelles nous allons passer de l’année 1953, en faisant des allers-retours vers le passé, en 1944. Chaque espace temps étant bien délimité et nous permettant de découvrir l’histoire de tous les personnages du temps de la guerre. L’auteure a su donner la parole à chacun d’eux, utilisant une narration différente selon les personnages, tantôt à la troisième personne, tantôt la première, mais chaque narration nous apporte la même quantité d’informations sur les personnages, tout comme sur les émotions éprouvées par chacun d’eux. La construction de ce roman ainsi en plusieurs parties, marquent l’histoire de plusieurs étapes, et l’alternance des périodes nous offrent les informations en temps voulu, nous permettant ainsi de cheminer dans l’histoire qui lie tous les personnages autour d’un enfant.

Nous commençons le récit en 1953, aux Etats-Unis, avec Jean-Luc et Charlotte, qui vivent depuis des années maintenant avec leur fils Sam en Californie. Jean-Luc et Charlotte sont français, et ils ont fuit la France pendant la guerre avec Sam, pour le sauver. Sam n’est pas leur fils biologique, il a été confié à Jean-Luc par sa mère, qui était juive alors qu’elle allait partir vers un camp de concentration, le bébé n’avait que quelques jours alors. L’histoire nous présente le couple dans sa vie actuelle, en parents aimants, avec un Sam épanoui et heureux, jusqu’au moment où la police vient frapper à leur porte. C’est alors que nous nous replongeons dans le passé pour d’abord aborder l’histoire de Jean-Luc, sa rencontre avec Charlotte, et l’histoire de leur relation qui née en temps de guerre. Ils sont alors bien jeunes, Charlotte a dix-huit ans et Jean-Luc vingt et un, et tous deux sont confrontés à l’occupation allemande. Il sera alors passionnant de découvrir de quelles façons ils vivent tous deux cette occupation et tout ce que cela engendre comme changements dans leur vie. Nous sommes alors ancrés dans le Paris occupé, avec cette question de ce qui est bien, et de ce qui est mal. L’Allemagne a pris le contrôle du pays et s’octroie tous les droits, les français se doivent de leur obéir, mais ils se posent beaucoup de questions jusqu’à se demander où débute la collaboration. En effet, de « travailler » pour eux, alors que l’on n’a pas le choix est-il une forme de collaboration ? Ils envisageront tous deux de quitter Paris, de rejoindre le maquis, de se rendre utile pour lutter contre les allemands. Les français, bien qu’ils ne soient coupable de rien vis à vis de la loi, vivent dans la peur constante de ce que les allemands pourraient leur faire, la moindre sortie se fait sous pression de peur d’un contrôle, leur jeunesse les poussent à vouloir agir mais ils n’ont pas toutes les cartes en main pour savoir quoi faire.

C’est alors que le destin accélère les choses, il place Samuel sur leur chemin. Jean-Luc se voit confier ce bébé, et tout se précipite, il décide de fuir avec lui pour le sauver et Charlotte décide de le suivre. C’est ainsi que nous les suivrons dans leur fuite, ce moment où ils vont devenir une famille par la force des choses. Pour savoir qui est Samuel, nous ferons aussi la connaissance de ses parents, ce jeune couple juif qui va tout faire pour se cacher alors que les allemands embarquent tous les juifs vers Drancy, avant la déportation vers l’Est. On reste plongé dans ce Paris occupé, mais du point de vue de ceux qui sont persécutés et poursuivis, ceux dont on veut se débarrasser. Sarah et David sont un jeune couple amoureux et qui ont toujours l’espoir que tout cela prendra fin et qu’ils reverront leur famille, mais la naissance de Samuel précipite les choses, et quant ils se font prendre, ils se font la promesse de tenir et de se retrouver.

La vision de tous ces personnages nous apporte énormément, elle nous permet de vivre tous ces moments cruciaux de l’histoire de différents points de vue. Cela nous permet de comprendre toutes les décisions prises et c’est d’autant plus important que du coup, on comprend ce que chacun a pu éprouver à chaque moment et on ne peut que valider les choix de chacun d’eux. Quand plusieurs années plus tard, le sort de Samuel passe en jugement, on sait alors que quoiqu’il arrive, ils vont souffrir d’un côté comme de l’autre et c’est déchirant alors de les voir être pris dans la tourmente des événements. Samuel sera au centre de tout cela, il sera le pilier autour de qui tout tournera. On appréhendera son personnage au début au travers du regard de ses parents, tant biologiques que de coeur, voyant ce bébé être l’espoir de lendemains heureux. Puis des années plus tard, il prend part à la narration, nous offrant son point de vue, celui d’un enfant que l’on arrache à un foyer dans lequel il était heureux pour aller vivre chez ses « vrais » parents dont il n’a jamais entendu parler. Il vivra alors des moments de solitude intense, où il ne sera plus trop qui il est, mais en restant toujours ancré dans sa famille de coeur, celle qui l’a éduqué. Samuel est très jeune, et ne peut pas se rendre compte de ce que ses parents biologiques ont vécu, de l’impact que cette décision de le confier à Jean-Luc a eu sur chaque personne que s’est occupée de lui, cela rendra les choses d’autant plus difficiles alors.

Ce que j’ai apprécié, c’est que l’auteure nous présente tous ses personnages tels qu’ils sont, sans être glorifiants, ils sont munis de leurs défauts, de leurs doutes, de leurs peurs légitimes, des questions qui les taraudent et des décisions qu’ils prennent, et cela fait d’eux des individus plus proches de la réalité de la vie qui est la leur alors. Mais s’ils ne se considèrent pas comme des héros, ils sont tout de même courageux, déterminés et ils iront jusqu’au bout pour mener à bien les perspectives d’avenir qui s’offrent à eux. Chacun d’eux vivra comme il le peut, avec toutefois cette part de culpabilité qui les empêche d’être complètement heureux, mais la guerre a changé tant de choses dans leur vie, qu’ils doivent se raccrocher à ce qu’ils ont. Si lors de notre lecture, on pourrait porter un jugement sur tel ou tel agissement, pouvons-nous toutefois nous le permettre ? Rien n’a été décidé pour faire du mal, et chaque décision prise l’était pour que le moins de personne ne souffre et c’est par amour qu’ils agiront. De mon côté, j’ai été touchée par chacun d’eux, par ce que tous ont vécu et j’ai trouvé la direction qu’a pris cette histoire très intéressante. L’amour parentale nous est présenté sous différentes formes mais il reste le sujet central de l’histoire.

C’est un roman bouleversant et très émouvant. Déjà il évoque une sombre période qui nous rappelle que l’humanité a été heurtée profondément, et de parler de cette guerre provoque déjà bien des émotions, c’est bien entendu ce qui a motivé mon intérêt pour ce livre, cette période de la seconde guerre mondiale. Mais au delà de cela, ce roman évoque l’amour parentale qui va être ici mis à rudes épreuves. Tant de sentiments seront alors abordées : la peur, la souffrance, le courage, l’espoir, le désespoir, la tristesse, chaque personne éprouvera tous ces sentiments et ce de façons différentes, dans des conditions différentes et à des moments différents, mais chaque sentiment éprouvé sera légitime. Ce qui est très beau avec ce texte, c’est comme je le disais plus haut, de pouvoir comprendre ce que chacun d’eux a choisi de faire. Ce n’était peut être pas toujours les bonnes décisions, mais elles restent compréhensibles. J’ai trouvé la fin de ce roman vraiment très belle, elle m’a beaucoup touchée, pour moi, l’histoire n’aurait pas pu se dérouler autrement, même si je n’ai pas trouvé juste toutes les décisions qui ont été prises.

C’est un premier roman pour l’auteure et je l’ai trouvé vraiment très beau. Je ne m’attendais pas à vivre tant de moments très marquants de l’histoire, à travers l’histoire de deux couples, des parents et cet enfant qui va être l’élément déclencheur de toute cette histoire. On y évoque l’occupation de Paris par les nazis, la position des français de l’époque, qu’ils soient collabo ou pas, et c’était justement très intéressant de s’interroger sur cette vision de collaboration. La déportation des juifs est aussi bien entendu traitée, avec d’abord ces doutes qui s’insinuent dans le monde quand au destin des prisonniers juifs, puis en vivant la déportation de Sarah et David. L’auteure évoque aussi la Résistance, le passage des personnes en fuite et l’autre versant du monde, l’Amérique. Tant d’éléments passionnants à lire durant cette période qui a mis le monde au plus bas. L’enfant du train est un roman parfaitement bien équilibré qui nous offre une vision de la seconde guerre mondiale très intéressante.

L’enfant du train
De Ruth Druart
City Editions
Broché 477 pages
Sortie le 16/06/2021

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