Résumé de l’éditeur :
Grâce au courage d’Ester et d’autres de ses codétenues à Auschwitz, plusieurs bébés, nés dans le camp, ont réussi à survivre. Chacun a été tatoué du numéro de déportée de sa mère. Ester a elle-même donné la vie à une petite Pippa, qui lui a été retirée au profit d’une famille allemande. À la libération du camp, Ester fait partie des rares rescapés. Dès lors, elle n’aura de cesse de retrouver son enfant. Mais au lendemain de la guerre, l’Europe est en proie au chaos, et l’histoire n’a pas fini de bouleverser les destinées. Plus le temps passe, plus les chances d’Ester de récupérer Pippa s’amenuisent… Parviendront-elles un jour à être réunies ?
J’ai lu le précédent roman d’Anna Stuart sur cette série de Femmes de guerre en poche, tout comme celui-ci, lors de leur sortie chez J’ai Lu. Avec La sage-femme d’Auschwitz, nous avions suivi une sage-femme et une infirmière qui se sont occupées des femmes enceintes dans un camps de concentration. Elles se sont alors retrouvées confrontées à l’opération Lebensborn – citation de ma précédente chronique pour expliquer le but de cette opération : “les nazis ont décidé de promouvoir la race aryenne et ont souhaité « offrir » aux femmes allemandes privées de leurs maris de beaux bébés de type aryen. Toutes femmes mettant au monde un bébé blond, pâle de peau se voyaient donc enlever son bébé à la naissance et c’est Ana en tant que sage-femme qui sera au coeur de cette opération. Pour parer à cette séparation et pour laisser une chance aux mères de retrouver leurs enfants, elles ont tatoué le numéro des mères sous les aisselles de leurs enfants.“ Ce deuxième roman nous conte la suite de cette histoire.
A la fin du premier tome, Esther l’infirmière qui a mis au monde tant de bébés avec Ana, était bien décidée à retrouver sa propre fille qui lui a été enlevée. Elle a retrouvé Filip, cet homme dont elle est tombée amoureuse juste au début de la guerre, le père de son enfant. Alors qu’ils visitaient un orphelinat, ils ont retrouvé une enfant oui mais pas la leur. On les retrouve dans les années 60 avec la génération qui suit et en parallèle l’histoire de plusieurs personnages. Anna Stuart mène son récit en magnant avec brio la multiple narration à la troisième personne, nous insufflant ainsi en temps voulu les informations nécessaires qui nous permettent de comprendre les tenants et aboutissants de cette histoire.
Nous sommes donc en 1960, les enfants nés en 1943 ont aujourd’hui 17 ans et entament petit à petit leur vie d’adulte, sortant de l’enfance qu’ils ont vécu et se retrouvant confrontés alors à quelques vérités sur leur vie mais aussi sur ce qui se passent dans leur pays. Ce sont ainsi deux jeunes femmes de 17 ans que nous allons suivre : Olivia et Kirsten toutes deux élevées dans des familles avec des parents qui ne sont pas leurs parents biologiques. Chacune d’elle nous permettra alors de saisir un pan de l’histoire différent sur ce que leur famille ont vécu durant la seconde guerre mondiale et après la capitulation de l’Allemagne, le pays où elles vivent. Autant vous dire que le récit est foisonnant d’informations sur bien des sujets et captivant à lire.
D’un côté, nous avons cette enfant qui a été sauvée à deux reprises par Esther, Olivia. Une première fois quand elle a été tatouée par cette dernière dans les camps de concentration pour que l’on puisse la retrouver après et une deuxième fois quand Esther et Filip l’ont trouvé dans un orphelinat alors qu’ils cherchaient leur fille. Elle va grandir au coeur de cette famille adoptante qu’elle considère comme la sienne, tout en ayant bien connaissance des faits et de l’histoire de ses parents adoptifs. Elle a ainsi des jeunes frères d’une dizaine d’années et elle est donc l’ainée d’une fratrie, elle a trouvé sa place au sein de cette famille mais elle ne sait pas tout d’elle encore. C’est ainsi qu’elle découvre que sa mère, Esther a eu une enfant pendant la guerre mais qu’elle ne l’a jamais retrouvée et elle ne comprend pas pourquoi Filip et cette dernière ont cessé les recherches. On aborde là un sujet en rapport avec l’impact que le placement de ces enfants a eu sur la vie de ces familles à qui on a arraché un enfant et par extension l’impact que cela a sur l’enfant et la famille qui l’a accueilli. Un sujet vaste, douloureux et poignant car dans l’idée aucun parti n’est en faute, si ce n’est ce gouvernement allemand qui a pris la décision de cette séparation en tant de guerre.
Kirsten quand à elle, appartient à une famille allemande dont le père est décédé, enfin cela, c’est ce qu’il croyait. Quand ce dernier refait surface, bien des choses sont remuées et des secrets vite dévoilées, mettant à mal l’équilibre de vie qu’avait Kirsten. Elle apprend que son père était un nazi durant la guerre et qu’il a commis bien des crimes mais ce retour va rompre cette famille qui tentait de vivre dans cette nouvelle Allemagne depuis toutes ces années. Kirsten est une enfant juive qui a été enlevée à sa mère et confiée aux bons soins de Lotti, celle qu’elle croyait être sa mère. Kirsten qui a connu une vie plutôt aisée fut un temps, est confrontée aujourd’hui à une vie plus précaire car sa famille a perdu toutes ses richesses à la fin de la guerre. Elle travaille dans un petit café et elle se cherche encore, ne sachant plus trop qui elle est quand elle découvre la vérité.
Toutes deux seront donc confrontées à cette vérité cruelle qui change leur vie et leur vision des choses. Elles seront toutes deux amenées à faire des recherches, l’une pour retrouver la fille de cette femme qu’elle considère comme sa femme pour retrouver cette fille qu’elle considère elle comme sa soeur, et l’autre voudra retrouver ses parents biologiques. Les recherches sont un sujet très important alors puisqu’elles ne se passent pas pareil d’un côté comme de l’autre, selon vers quel camp on s’adresse mais on note toutefois que chacune d’entre elles, sera confrontée à cette omniprésente et ce besoin important des uns et des autres d’avoir des informations sur l’autre camp, tout se monnaye alors et certaines prises de décisions pourraient être cruellement destructrice. Nous sommes dans un pays régit par plusieurs nations, et la guerre froide fait rage avec ce combat incessant entre les Etats-Unis et l’URSS.
Nous revivrons à travers leur histoire cette occupation et l’impact qu’elle a sur la vie de chacun d’eux. Si l’on parle des ignominies de la guerre, l’après-guerre a eu son lot aussi et les femmes ont été au coeur même des représailles commises par les occupants. Des femmes dont nous découvrons tout dans ce tome, Olivia et Kirsten sont loin d’imaginer tout ce que leurs mères ont vécu alors. Olivia va intégrer une équipe sportive, Dynamo qui réunit des sportifs de hauts niveaux pour les préparer aux jeux olympiques, on entre alors dans un vaste projet qui emploiera quelques méthodes controversées dans le but de réussir et de remportes ces jeux, mais ceux au dépend de ceux et celles qui ont cru en eux. Elle rencontrera alors un jeune homme qui prendra une place importante dans sa vie et l’accompagnera dans ses démarches pour retrouver sa soeur. Kirsten de son côté, fera la connaissance de quelques jeunes qui n’acceptent pas la situation et souhaitent contrer ce qu’il se passe dans leur pays.
Un pays qui vit difficilement suite aux conflits et en étant en plein coeur de Berlin, on se rendra compte de l’horreur qu’ils vivent avec la montée de ce mur de Berlin qui a séparé la vie des habitants en deux. Nombre d’entre eux se retrouveront ainsi prisonniers entre des murs, sous la gérance d’une nation qui commettra bien des faits. Le récit d’Anna Stuart est poignant, on est déchiré par la découverte de l’histoire de toutes ces familles, la guerre n’a épargné personne et l’après-guerre n’a pas été très réjouissante.
Ce roman est passionnant, j’ai vraiment trouvé que c’était un bon rebond après un premier tome poignant et déchirant, la situation dans les camps s’y portant. Je suis une passionnée de cette guerre mais lire ce qu’il a pu se passer après, voir que les peuples ont continué de souffrir dans des conditions de vie pas toujours faciles, c’est très intéressant. Ici, dans cette Allemagne d’après guerre qui a été fortement marquée par la présence de plusieurs nations « gagnantes » de ce conflit qui ont occupé les lieux, sans réussir à créer une unité, nous sommes confrontés à tant de souffrances.
La sage-femme de Berlin
D’Anna Stuart
Editions J’ai Lu
Broché, poche de 512 pages
Sortie le 05/02/2025
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Série Femmes de guerre :
Tome 1 : La sage-femme d’Auschwitz (GF chez City éditions, poche 06/03/2024)
Tome 2 : La sage-femme de Berlin (GF chez City éditions 21/02/2024, poche 05/02/2025)
Tome 3 : L’orpheline d’Auschwitz (GF chez City éditions 05/02/2025)