Résumé :
Depuis des années, Amy subit la violence de Gary. Jusqu’au jour où elle reçoit le coup de trop et décide de s’enfuir avec ses deux enfants, Jackson, dix-huit ans, et Lydia, treize ans. Premier arrêt au Starlight, motel crasseux qui va leur servir de refuge. Tous les trois s’endorment sereins et soulagés, mais au petit matin Jackson a disparu. Croyant gagner l’amour d’un père qui le rejette, il est retourné chez eux et a trahi sa mère et sa sœur en révélant à Gary l’adresse du motel. Amy se rend alors à l’évidence : si elle veut assurer sa sécurité et celle de Lydia, elle va devoir abandonner son fils. Cette séparation brise le cœur de la petite fille, très attachée à ce frère doux et différent. Jackson, de son côté, doit désormais se débrouiller seul, tiraillé entre la recherche désespérée de l’amour paternel, sa culpabilité et sa difficulté à gérer son homosexualité naissante.
De beaux jours à venir est un roman terriblement juste, touchant et sans complaisance, sur la famille, les sacrifices que l’on peut faire en son nom, et leurs conséquences. Un chef-d’œuvre où l’émotion prend à la gorge à chaque page.
★ Merci aux Editions Denoël et à Babelio pour ce SP ★
☆ AVIS DE BELI ☆
« De beaux jours à venir » c’est ce que l’on espère lire pour les trois personnages qui composent la narration de cette histoire. Le récit se passe en 2010 et nous remontons dans le passé à travers les souvenirs des personnages sur leur vie passée pour comprendre pourquoi ils en sont arrivés à être où ils sont. Si j’ai trouvé le début un peu long à démarrer, se perdant dans des longs paragraphes de descriptions qui nous rendent l’ensemble un peu lourd à lire, la suite prend plus de vie et on apprend à mieux connaitre les personnages et cela redonne un peu de peps à l’ensemble. Que va-t-il advenir d’eux ? C’est la question qui nous pousse à vouloir poursuivre la lecture, en se demandant toutefois s’ils finiront par être heureux car jusque là, ils n’ont pas réussi à jouir de la vie.
Il y a Amy, la mère de Jackson et Lydia, tous trois vivent avec Gary, un mari violent et un mauvais père. Amy tentera de s’enfuir plusieurs fois mais n’y parviendra pas, il les rattrape tout le temps jusqu’à cette fois où ils réussirent mais Jackson rentre retrouver son père et lui dit où elles se trouvent. A la suite de ce retour, Amy décide de partir uniquement avec Lydia. Jackson a alors 18 ans, il va pouvoir commencer sa vie et le risque qu’il les dénonce encore est trop important, elle se doit de mettre sa fille à l’abris. Chacun part de leur côté et nous suivrons alors Amy et Lydia d’un côté et Jackson de l’autre, on chemine à travers leur présent où ils tentent de s’en sortir comme ils peuvent, guider par des sentiments divers : la peur, la culpabilité, les incertitudes, la tristesse… et leur passé, ce qui nous permet de bien mieux les connaitre et de comprendre bien des choses sur ce qu’ils ressentent aujourd’hui.
Jackson se retrouve seul mais à 18 ans, il se sent capable de pouvoir vivre ainsi, de petits boulots en passant par une période sombre où faire le tapin était son seul moyen de survivre. On touche avec lui au sujet de l’acceptation de l’homosexualité dans une société et un pays où des inégalités sur le sujet varient d’un état à un autre. Jackson n’a jamais caché qu’il était gay mais ne l’a jamais annoncé haut et fort, sa situation familiale n’aidant en rien, les sentiments y étant très peu abordés.
Il a toujours été très proche de sa petite soeur Lydia, alors âgée de 13 ans, lorsque son père s’en prenait à sa mère, le mot d’ordre de cette dernière était de ne pas intervenir et de fuir pour se protéger. Il a toujours obéis mais au delà de détester son père, il en voulait à sa mère de faire perdurer cette situation qui les rendait tous malheureux.
Amy a quitté sa famille au Texas pour suivre Gary à 18 ans, tout semblait aller bien, mais à la naissance de Lydia, son mari a changé et plus rien n’est allé comme il fallait. Ils commencèrent alors à vivre avec cette peur de tous les jours qu’il soit en colère et ils apprirent à gérer son tempérament changeant entre la colère et les mots doux.
Alors est-ce que Amy a été lâche de mettre tant de temps à partir ? non elle a essayé bien des fois mais être dans sa situation n’a rien d’évident car il n’était pas tout le temps ainsi et la peur qui la tiraille dicte ses actes, son but étant de protéger ses enfants. J’ai trouvé cette femme pleine de courage et son attitude pour tenter d’épargner ses enfants des coups portés par son mari nous la rend admirable, même si le mal occasionné sur eux était tout autre.
Lydia est une jeune fille dont on apprend peu mais on la découvre à travers ses rapports avec les autres, et elle semble être plutôt intelligente, sensible et elle aime son frère plus que tout. Ses rapports avec sa mère sont étranges, une certaine distance s’est instaurée mais Amy a agit ainsi de façon à ce qu’ils se tiennent le plus éloignés possible de leur père. La colère guide une partie de ses actes, elle se refuse à être heureuse mais comment pourrait-on l’être dans ces conditions de vie ? Elle est constamment triste et cela inquiète sa mère qui s’en veut d’autant plus d’avoir du la séparer de son frère.
Avec Lydia et Amy, on se retrouve au nouveau Mexique, dans un foyer pour femmes, fuyants souvent la maltraitance, elles y resteront deux mois avant de rejoindre le Texas, chez la mère d’Amy tandis que Jackson travaille sur un chantier dans l’Idaho où il rencontre Don.
Chacun tente de refaire sa vie mais la culpabilité est le sentiment qui prédomine en chacun d’eux : Amy se reproche par exemple de n’avoir pas pu protéger ses enfants comme il se doit, Jackson s’en veut d’avoir dénoncer sa mère et sa soeur à son père et Lydia s’en veut d’être née, le moment où tout a changé. La culpabilité de ne plus être ensemble, de ne plus avoir de contact, les liens qui les unissent sont forts et fidèles et ils semblent ne pas réellement trouver le bonheur dans une vie pauvre et solitaire.
Le récit a un côté sombre car ils semblent courir après une normalité qu’ils ont du mal à atteindre, c’est désarmant de voir dans quelle tristesse ils évoluent. On découvre une Amérique profonde et loin de celle qui brille, on se retrouve dans des villes enterrées dans le fin fond de ce pays où la pauvreté régit et où les gens se contentent de peu ou alors rêvent d’évasions et de richesses.
C’est un roman qui évoque un drame familial où la maltraitance physique et mentale régissent leur vie, rien ne semble leur sourire et même loin de Gary, son ombre plane sur eux car le mal est fait et leur vie familiale a façonné leur état d’esprit. La structure du roman est fondée sur un chapitre qui concerne un des narrateurs, à une époque et dans un lieu, on passe du passé au présent, d’un personnage à un autre et à aucun moment on se dit que l’on a n’a pas envie de quitter tel ou tel moment, chaque chapitre apporte des précisions qui nous permet de mieux connaitre ces trois personnages. L’écriture de Megan Kruse est fluide et on sent bien l’implication qu’elle a mis dans ses personnages, tous sont évoqués en détails de leur enfance au moment présent.
Si j’ai eu du mal au tout début, je me suis attachée à ces personnages et j’ai aimé les accompagner vers de beaux jours dans la découverte de qui ils sont, loin de ce père despotique car on ne souhaite pas que les moments qu’ils ont vécu jusque là puissent régir le reste de leur vie. Il serait difficile de classer ce roman, qui évoque une tranche de vie d’une famille soudée dans l’adversité et qui sera se retrouver pour ce qu’il y a à venir.
« De beaux jours à venir » de Megan Kruse
Editions Denoël le 25/08/2016 : 372 pagesNOTE : 4/5