Résumé :
C’est l’histoire d’une adolescente sans doute un peu trop ronde, sans doute un peu trop fragile.
C’est l’histoire d’un nouveau lycée, des yeux qui dévisagent, des yeux qui jugent.
C’est l’histoire d’un professeur d’allemand qui séduit.
Mélissa, 17 ans, suit ses parents dans une nouvelle ville, un nouveau lycée.
Année de terminale sur la corde raide. Année charnière entre dégoût de soi, et renaissance.
☆ AVIS DE BELI ☆
Ce roman m’attendait dans ma bibliothèque, on me l’a offert à Noël car j’avais très envie de le lire. C’est en prévision d’une rencontre avec l’auteure, que j’ai déjà lu que je me suis dite que le moment était bien choisit pour le découvrir. Je savais que ce roman allait me toucher, j’ai vu les réactions des lectrices qui l’ont adoré et j’étais donc prête et armée pour m’y attaquer.
Mel est la jeune fille que nous allons suivre, elle est en dernière année de lycée. Elle déménage durant l’été avant l’entrée en terminale, elle va donc laisser ses habitudes, sa maison et surtout sa meilleure amie pour l’inconnu. Son père est militaire et elle se doit de suivre ses différentes affectations. Mais elle a dix-sept ans cette fois-ci et elle est en colère contre ses parents, elle ne le cache pas à sa mère et entame cette rentrée très négativement. Et tout se passe exactement comme elle l’avait prévue : Mel est en surpoids et elle n’accepte pas son corps tel quel, et c’est ainsi que dès le premier jour, elle sera victime de remarques, de moqueries et de sobriquets de la part de ses camarades de classes. C’est ainsi que débute son année, et si Mel semble être forte face à toutes ces attaques, on sait bien que cela n’est pas le cas, elle souffre énormément et ne s’en déteste que davantage.
Ce n’est donc pas auprès de ses camarades qu’elle va trouver quelqu’un pour qui l’épauler, puisque se sont les plus populaires qui vont s’attaquer à elle, personne ne veut plus lui adresser la parole. Reste une personne qui a su être bienveillante envers elle : son professeur d’allemand. Un jeune et séduisant professeur qui va s’intéresser à elle, lui proposer son aide. Son attitude est toutefois un peu ambigüe, tantôt gentil, cordial, charmant, tantôt plus distant. Il sera son ancre, son repère, ce qui la pousse à se lever le matin, sa seule motivation pour aller au lycée. Mais cette fascination qu’il exerce sur elle, n’est pas de bonne augure, d’après sa meilleure amie Camille, un professeur et son élève n’ont pas le droit de partager plus que de l’enseignement.
Voilà ainsi de quoi est fait le nouveau quotidien de Mel : les insultes, les remarques désobligeantes et insultantes, les moqueries, les coups par derrière de ses camarades qui l’ont pris en grippe. Et cette fascination pour cet homme, qui a se montrer gentil et charmant avec elle. Sa vie d’avant, reste ce qu’elle préfère, quand elle y retourne, elle s’y sent bien, lui rappelant à quel point sa nouvelle vie est dure. Camille reste sa meilleure amie, elle fera aussi la connaissance par son biais d’autres jeunes de son âge, mais elle sera toujours celle, qui seule doit tout affronter. Petit à petit, elle continue de se détester et de se fustiger de croire que l’on puisse s’intéresser à elle d’une manière ou d’une autre : amicalement, amoureusement… elle se dénigre et se condamne elle-même à être une personne sans intérêt. Carène Ponte aborde donc ce thème fort du harcèlement, fait de société très souvent abordé de nos jours, de multiples façons : elle nous décrit le quotidien de Mel, sans équivoques, tel qu’elle le vit elle, de plein fouet. Mais elle évoque aussi les conséquences que cela a sur la jeune fille, qui ne s’aime pas, qui ne pense que négativement, se cloisonnant dans une solitude extrême. Puis elle parlera aussi de ce besoin de rendre la pareil à tout le mal qu’on lui a fait, à force de souffrir, on voudrait aussi que les autres souffrent. C’est un exercice si facile de faire du mal aux autres, bien plus que de les aimer semble-t-il ?
Ce roman m’a procuré des émotions fortes, ce que vit Mel est tellement le reflet de la société d’aujourd’hui. Tant de jeunes vivent constamment ce harcèlement pour une raison ou une autre. Ici, c’est parce que Mel est en surpoids qu’elle vit ces moments difficiles et ce qu’elle a pu ressentir à maintes reprises comme humiliations, insultes, attaques m’ont profondément peinée. Elles m’ont certes rappeler des moments de ma propre adolescence, des moments qui m’ont petit à petit profondément encrée dans des idées noires me concernant, et j’ai compris ce qu’elle a pu ressentir. J’ai lu ce roman, en tant que personne qui a aussi vécu du harcèlement, à l’époque d’ailleurs, on n’en parlait pas ainsi, je me disais « tu as ses défauts, les gens les voient et le disent… il n’y a rien à faire », me suis-je alors confiée à ma mère ? ou à une amie ? un proche ? Je ne crois pas, j’ai du garder cela pour moi, m’imaginant qu’en me blindant, je passerai outre, mais non cela ne fonctionne pas ainsi. C’est aussi en tant que mère que j’ai lu ce roman, mère notamment d’une jeune adolescente, et là je tiens un discours complètement différent : il est inadmissible que ce genre de propos puissent être tenus contre quelqu’un. Mais ma fille agirait-elle comme moi ou comme Mel, en gardant cela pour soi, si cela lui arrivait ? C’est assez effrayant.
C’est une histoire, un fait romancé, mais cela reste tellement le reflet de ce que vivent bon nombre d’adolescents. Un livre qui comme quelques autres, devrait être lu par cette génération, qui passe son temps à dénigrer l’autre. La plume de Carène Ponte a été mise au service d’un roman très fort, et poignant. Il se lit avec énormément de facilité, si ce n’est les moments où l’on est gêné par les larmes que provoquent la découverte des faits et de ses conséquences. Carène Ponte aborde le harcèlement par bien des facettes, nous prouvant que n’importe qui peut souffrir et ce qu’elle soit populaire ou pas. Ce roman nous rappelle qu’il faut être tolérant et à l’écoute des autres, mais aussi qu’une moquerie peut avoir des répercutions terribles sur une personne et sur toute sa vie.
« Gros sur le coeur » de Carène Ponte
Editions Michel Lafon Poche le 15/11/2018 : 254 pagesNOTE : 5/5